J’ai oublié de te parler de l’introduction ; ça aurait été du genre : Il faut que je retienne tout ça, je vais devoir l’écrire. Il faudra que je trouve un moyen de faire une introduction dans laquelle le temps existe, et puis d’un coup bam! le présent… en même temps je ne sais pas si c'est très ultra-présent ça.
J’étais en train de rentrer chez moi, en voiture. J’écoutais la radio, il s’agissait d’un entretien littéraire avec un écrivain, et l’intervieweuse lance le mot “ultra-présent”. Je n’écoutais que d’une oreille alors je ne sais pas de quoi elle parlait, dans mes réflexions personnelles, entre réflexions sur l’amitié, plaisir d’un apéro, la conduite, la projection dans mon retour à la maison… je n’entends quasiment que ce concept, ou plus exactement maintenant que j’écris mes pensées c'est la seule chose que j’ai retenue.
“Ultra-présent”, que serait-ce donc ? l’annihilation temporaire de l'écoulement du temps ? il faudrait penser un processus narratif émancipé de tout processus narratif, où les événements s'imbriqueraient plutôt que de se succéder. On aurait dit que le concept-clé ce serait la superposition… jouons. Et je me suis dit, voilà, c’est ça qu’il faut que je te raconte, la soudaineté du présent, qui s’accumule. Mais alors avec ce procédé narratif contre-narratif il faudrait raconter une histoire, même si elle ne serait qu’une pile de choses, avec la simultanéité des idées et des sentiments. Oui, c’est ça qu’il faut que je te raconte… très bien le présent, mais quoi alors ? Mais ça justement. C’est meta, pas si original, mais c’est ça mon ultra-présent : la question de ce qu’est l’utra-présent. Bien sûr mes sentiments, mes pensées ont une temporalité, et se raccorde à une historicité du monde, on pourrait faire des flash-back pour retracer justement le temps de chaque sensation… mais ce serait se rapprocher de la Recherche du Temps Perdu de Proust, et sa madeleine, oui… ce moment qui en un clin d’oeil retrace le temps passé puis finalement retrouve la temporalité. Mais ce n’est que le présent ça, pas l’ultra-présent, c'est simplement le présent qui s'écoule, le présent de la littérature. Depuis combien de temps je n’ai pas ressenti le besoin d’écrire, je me dis, je me dis que je me dis que ça fait longtemps que je n’ai pas eu envie d’écrire. Ah voilà, c'est le besoin d’écrire, je le reconnais, il faut que je le tienne parce que là je conduis, je ne peux pas écrire. J’avais raconté autrefois comment je devais m’organiser pour pouvoir écrire lorsque soudain je devais le faire, comment je devais m'arrêter pour tenir l’instant et le retracer. Oui, je vais t’écrire ça… je me dis, là, qu’en l’instant tu dois te dire “Wow ! c'est quoi tout ce pavé d’un seul coup !?” et ça me fait rire… et ça me fait rire de l’écrire maintenant que je me relis alors que j’avais oublié de l’écrire au premier jet. Alors de quoi s’agit-il ? Bam-bam-bam ! les choses s’empilent, se superposent c'est violent parce que c'est instantané… il faudrait trouver une structure, un sens. Pourquoi écrire demandait Sartres, et je réponds “pour qui ?” parce qu’il a éludé la question sous prétexte que ce serait pour personne alors que c'est dans cette contradiction (superposition ?) que ça se joue… “c'est dans la répétition que réside le symptôme” avais-je entendu un soir à la FIAC dans ma période parisienne, dans une mise en scène poignante (? le point d’interrogation c'est que j’étais avec une copine qui ne trouvait pas ça poignant) de l’exercice vain de la psychanalyse. Et je vois justement des lumières, c’est la lune, ah mon inspiration ma muse ? non ce sont des grues, oui il y a des travaux mais où, que se passe-t-il dans ce quartier ? Il y a une dynamique d’aménagement, la ville grandit et il faudrait adopter une approche démographique. Car c’est ça aussi le présent, un instant de l’histoire en marche. Maintenant que j'ai fini Une Esquisse de l’Histoire humaine de Todd, il faut faire une ultra-brève esquisse de l’histoire de l’humanité, c’est ça le projet… peut-on en faire un livre ? L’idée c’est la superposition, je me le re-confirme à moi-même, il faut que je tienne cette idée, là maintenant, je pense à l’ultra-présent, je vais te raconter ça quand je serai revenu dans le temps. C'est un nouveau dispositif narratif, comme les pièces de théâtre classique où l’action se passait sur une journée et en lieu… à la radio l’auteur parle de localité… non, l’ultra-présent c’est l’ultra-localité, c’est l’ultra ici-et-maintenant. Le temps… la sélection naturelle nous a fait accéder au temps qui passe, c’est à cause de l’épuisement du présent. Rien n’est épuisé, encore. L’ultra-présent est là, je dois le tenir, qu’il dure ou plutôt ne dure pas. Je sais que je ressens le cuir du volant sous mes mains, j'essaie d’adapter mes mouvements à la douceur du cuir… peut-on avoir une conduite sensuelle ? ça c'est une question que je me suis déjà posée. Mais là maintenant je sens surtout ma poitrine gonflée, un élan, parce que je me dis, oui, c’est ça que j’ai envie te dire là maintenant. Je pense à toi, c'est une manière de me faire penser à toi. Mais alors la mémoire… ça va être dur de me souvenir de la superposition de ces pensées et mes sensation passent et sont difficiles à retracer, et au moment où j’écris je sais que j’ai oublié la moitié, je me presse de rentrer, je me presse de ne pas installer ma réflexion, je me presse d’écrire, je me presse de me relire, je ralentis le temps qui passe. Mais déjà il me rattrape, il m’a rattrapé, et comment je vais pouvoir écrire tout ça ? je compte sur mon écriture au moment d’écrire, l’action, dans le présent, va tout rattraper, je sais que sur le moment je serai capable de faire semblant de retrouver le présent… et c'est bien ce que je fais, je le reconstruis là maintenant en l’écrivant. Mais je passe, ça c’est le futur, ou plutôt le passé puisque c'est maintenant que j’écris… le temps me rattrape, vite je dois me dépêcher de le ralentir. Je suis chez moi je prends mon ordinateur, je vais t’écrire l'ultra-présent, je t’écris l’ultra-présent.
31 octobre 2018
Ultra-présent
Libellés : correspondance, délire, vécu
07 janvier 2015
A chaud
Evidemment ce n'est pas terrible, mais c'est ma réaction à moi...
Domenico Xobez, chef influent de la grande église gnafronnienne et nouveau député du parti des Frères Gnafrontistes, a déclaré ce matin sa candidature aux prochaines élections présidentielles.
"Il est très très important aujourd'hui de devenir président de la République. Je pourrai porter la voix du grand Gnafron et redonner une direction morale à ce pays qui souffre tant. J'ai beaucoup d'idées qui remettront tout le monde dans le rang, par exemple les enfants devront se tenir par la main deux par deux dans la rue et quand un vieux monsieur dira à un plus jeune de ranger sa chambre, celui-ci devra le faire." Domenico Xabez est ainsi le premier candidat ouvertement gnafrontiste aux présidentielles, sous les tonnerres d'applaudissements des journalistes présents, heureux de se scandaliser.
Une candidature qui a résonné bien étrangement après la fusillade de fin de matinée qui a vu la mort des marionnettistes de la troupe parisienne "Les Charlots du 6". Lors du drame les terroristes ont ainsi crié à plusieurs reprises "C'est bien fait, Gnafron est vengé", faisant référence à une représentation du théâtre de Guignol sulfureuse où les marionettistes avaient notamment représenté Gnafron se faisant rosser par le gendarme, par derrière.
La leader du parti du Front Guignolot, Dominique Cheaubaisse, gnafronphobe bien connue, et ayant fait parler d'elle récemment pour avoir instaurer le permis de s'assoire sur un banc dans la ville dont elle est la maire (ou "la maman" selon son expression), a réagit très rapidement en mettant en cause le candidat Xobez (tout en ayant de grandes difficultés à prononcer son nom d'origine espagnole) : "Je me présente devant vous comme la première opposante au gnafronisme étranger à notre culture qui intoxique ce pays. Même si je suis bien d'accord avec la plupart des idées des Frères Gnafrontistes, évidemment il faut ranger sa chambre, et que nous voteront certainement les mêmes lois au parlement, je suis la seule alternative crédible. Mr Xobez déclare notamment que Gnafron est la figure centrale de la politique en France : au Front Guignolot nous sommes totalement contre ! Gnafron est la figure centrale de la politique en France, mais, en plus il est méchant, et ça fait toute la différence car là, tout le monde comprend bien que c'est sérieux."
Interrogé par la suite directement au Paradis sur lequel il règne en maître, Gnafron, dieu tout puissant, s'est déclaré bien soulagé par la gentille vengeance de la journée, tant il avait été meurtri lors de la représentation de Guignol. Il a ajouté, visiblement accablé : "J'aimerais maintenant qu'on s'occupe de la petite Julie, qui est au CPn°2 de l'école primaire de Chaubont-la-mailleule, et qui a fait un vilain dessin à sa maîtresse, j'en ai du mal à dormir." Certains gnafronniens se sont tout de même déclarés surpris de la soudaine sensibilité de l'entité divine et notamment sur l'idée d'envisager un manque de sommeil. Très rapidement une association de malades en dernier stade du cancer s'est d'ailleurs montée à l'hôpital St-Nectaire. Leur première manifestation demandait notamment et très respectueusement au grand dieu s'il n'avait pas autre chose à faire. Celui-ci n'a pas encore cru bon d'intervenir en leur faveur, ne serait-ce que discrètement, ni répondre à ces revendications.
Libellés : déclaration, politique
22 avril 2014
Ce que j'avais compris de "Happy"
Ca parait débile mais voilà ce qui marche pour moi.
Prendre une pause, fermer les yeux et se dire qu'il fait beau.
Prendre une respiration et sentir l'air en soi comme un ballon
Chauffé par le soleil, monter dans le ciel, peu importe comment.
"Car je suis heureux"
Claquer des mains et se dire qu'on peut s'envoler si on le veut
"Car je suis heureux"
Claquer des mains et se dire que le bonheur est la vérité du moment
"Car je suis heureux"
Claquer des mains et se rappeler de tout ce que le bonheur peut apporter
"Car je suis heureux"
Claquer des mains et se dire qu'on est où on veut être à faire ce qu'on veut faire
Laisser passer les petits tracas, voilà.
Laisser parler son enthousiasme et ne pas regarder derrière soi, oui.
Attention : à partir de maintenant tout va bien.
Ne pas attendre que l'exceptionnel arrive et le temps ne sera pas perdu.
Être insensible à la pesanteur.
Mettre le niveau de bonheur si haut qu'il ne peut redescendre.
Pas de lourdeur il faut se dire.
Libellés : chanson
09 décembre 2013
Le recrutement
Libellés : correspondance, fiction
06 décembre 2013
Libérez Mandela !
22 juillet 2013
Légion : 1ere mission
- Va donc voir qui est à la porte Domenico, je n’attends personne.
- Vieux maître ! chuchota Domenico, sous le coup de l’émotion.- Oh ! c’est vous, dit Philippides, dont le visage s’éclaircit de joie. Je... je n’ai pas compris ce qu’il s’est passé... je... si soudain...- Je suis bien là, répondit Calypso.
- Je sais, je sais, chuchota-t-elle dans un sourire serein. Je sais que je vais faire une erreur, et si je n’en connais pas la nature je sais qu’aucun futur ne serait possible si je ne la faisais pas.
- Allons, allons, nous avons beaucoup à faire, nous avons une mission, ça va vous plaire vous allez voir. Vous connaissez Egon Thisrt ? demanda Calypso, excitée.
-Tu dois aller trouver Egon Thirst. Tu dois aller trouver Egon Thirst et le recruter. Il te dira comment suivre tes propres lignes temporelles, il saura comment utiliser tes pouvoirs.
-Home sweet home ! Dans une sorte de désert baignée d’une lumière aveuglante une dame drapée de blanc l'avait prise dans ses bras.- Viens, viens avec moi, avait-elle continué en la prenant par la main, et garde tes questions pour l’instant. Tu as fais un long voyage et nous avons tant à nous dire.
- C’est chez toi, c’est chez moi, tu es là, nous sommes presque toutes là, dit l’hôtesse Calypso à l’invitée Calypso.- Comment est-ce possible ? Suis-je donc morte ?- Oh non, tu n’en as pas fini avec moi, tu n’en as pas fini avec toi. Tu es plus dure à cuire que tu ne crois. C’est le Temps lui-même qui est ici.
- Egon Thirst... c’est donc lui...- Non. Mais il t’aidera... et tu feras une erreur, grave.- Comment ça ?- Une erreur qui pourrait faire écrouler l’ensemble de la réalité, et qui te vaudra des ennemis. Mais cette erreur est indispensable, dit l’hôtesse, caressant les cheveux de sa cadette d’une main triste et bienveillante.- Mais pourquoi ?- Tu vas le rencontrer alors, continuait l’aînée, en pleurs, tu le verras, tu l’aimeras, et ce ne sera pas... bien.- Pourquoi ?- Et moi je ne le reverrai plus... Vas, ne t’inquiète pas, l’avenir, le passé, le présent nous appartiennent, le monde est entre tes mains. Prends la mienne, et sens comme le destin est fort, ressens comment le temps circule en moi et comment tu peux retrouver ton chemin. Retournes dans le présent maintenant, et tu verras.
10 juin 2013
Le Plan : 1ère disparition
Libellés : fiction
19 octobre 2012
La disruption
Car le progrès, comme tout changement, nous n'en voulons pas. Nous voulons pouvoir espérer, pouvoir avoir des idées folles, mais quand nos actes ont des conséquences finalement... C'est la décadence : quand les espoirs d'avant, ceux-là même qui nous ont servi à nous projeter dans la réalité, ne sont plus incertains mais tout simplement abandonnés, le désir devant réinventer un objet.
Contre toute attente la confusion n'a plus d'importance, contre toute attente les moulins ont cessé de tourner, contre toute attente Don Quichotte a vaincu les géants.
La réalité c'est que nous ne pouvons pas dépasser notre condition, notre incomplétude. Si le progrès matériel émerge alors il remet en question toute notre intégrité, il nous oblige à regarder ce que nous sommes devenus, à accepter de constater peut-être que ce n'est pas la réalité qui, ne collant pas à nos fantasmes, ne nous méritait pas... que le mérite n'a rien à voir là-dedans. Et alors c'est toute la morale qui ne se limite plus à n'être qu'une construction symbolique et abstraite, sortie de la cuisse de Jupiter ou d'un buisson ardent. Tout est-il relatif ? Le vrai n'est-il plus qu'un moment du faux ? Ce serait bien trop simple. Il nous reste encore quelques moyens, les opportunités ne nous ont pas filé entre les doigts... nous nous devons d'assumer la responsabilité qui est la nôtre. Nous devons désirer notre destin, Sisyphe faisant sans doute tourner quelque mécanisme inconnu.
Il n'y a plus de modèle (et ce n'est certainement pas le moment d'admirer ceux qui empruntent le chemin qui fut le nôtre il y a longtemps), c'est la fin de la Fin de l'Histoire et nous avons enfin les moyens de nous investir dans l'incertitude. Nous nous tenons au sommet de la falaise, il ne s'agit pas de fermer les yeux ni pour sauter dans le vide, ni pour faire demi-tour : nous avons un pont à construire, une nouvelle route à ouvrir.
J'ai toujours trouvé le monde injuste, par la faute d'un temps asymétrique : le passé est connu mais irrécupérable, ne renonçons pas au futur.
Ce n'est pas parce que nous connaissons les choses mauvaises de la vie, que celle-ci se résume à celles-là. Nous avons avancé sans regarder notre montre, nous avons monté la montagne, sommes arrivés à un col et sans y prendre garde il est bientôt midi. Ne redescendons pas par le même chemin sous prétexte de recommencer à le monter.
Oui il y a des risques, tout peut s'écrouler. Nous concevions notre civilisation comme étant bâtie sur 3 piliers, en fermant correctement une époque qui va de Florence à New York nous nous offrons le luxe d'en ajouter un 4è. Le plus grand risque c'est de vouloir alléger la charge, mettre les piliers en vitrine, vivre comme des poupées de cire dans un musée qui se transformerait en ruine. Nous n'avons jamais voulu de train à vapeur, nous ne voulons pas de train à vapeur, c'est le plus loin qui nous intéresse. Alors l'avion n'est évidemment pas l'Amérique, encore moins l'horizon qui nous attendra encore longtemps, ne lui coupons pas les ailes de peur d'atteindre le ciel.
Libellés : architecture, correspondance, politique
14 décembre 2011
Titans
27 novembre 2011
Fauve
C’est le calme avant la tempête, l’eau est un miroir que je fends de mon petit esquif comme le patin d’un unijambiste. J’ouvre sous moi le reflet de ce ciel chargé de prochaine foudre, de prochaine colère, telle une plaie dont la chaire fine ne pourrait s’empêcher de s’agrandir. Etait-ce le flan du Christ qui s’épancherait bientôt d’une purification divine, anonçant le renouveau de l’Homme ? Zeus, plus sûrement, allait vouloir tonner, revendiquant sa place à travers les cieux.
Mais je suis à sec. Ce feu de l’horizon, c’est le soleil qui se couche enfin après m’avoir étreint si longtemps, m’avoir brûlé la peau et la gorge. J’ai mal à mon souffle, j’ai mal à ma volonté. Saurais-je trouver la force de tenir la barre, de me tenir à mon bateau ?
Demain. Demain je serai de l’autre côté du monde, et je trouverai de verts pâturages, des arbres d’or laissant traîner lassivement leurs cheveux dans l’eau limpide d’une baie aux anses multiples. Abondance du paysage, un nouveau monde que je t’ai dit te rapporter bientôt... il y a de cela des mois. Oui je saisirai cette main gigantesque posée sur l’océan, malgré les dieux et malgrés ses griffes, je la garderai auprès de moi.
Mais cette nuit...
Libellés : fiction