21 octobre 2011

Le bon, la brute et le truand

On parle beaucoup de ré-industrialisation en ce moment, ou de re-localisation de la production, comme moyen de sortir de la crise. Evidemment on peut commencer par se moquer un peu de l'idée que l'Allemagne, ce soit-disant exemple à suivre, réussira à s'en sortir, toute seule, comme si la balance commerciale pouvait faire sens sur toute la planète. Ce n'est sans doute pas le sens de ce qui se passe à l'heure actuelle.
Mais prenons l'idée au sérieux, en prenant pour exemple une industrie symbolique: l'industrie automobile.

Pourquoi produire, produire quoi et produire comment ?
Si l'objectif est de continuer à sortir des usines des produits-déchets, des voitures qui ont une durée de vie limitée et dans la maximisation de la reproductibilité de toutes ses pièces, en ne comptant que sur le marketing et la publicité pour les vendre, alors il n'y a aucune raison majeure de localiser cette production. Pourquoi d'ailleurs priver certains pays de cette source de croissance et qui en ont besoin pour se développer et quand ils sont les plus efficaces pour rendre le service qu'on demande (un produit-déchet) ? Ce qu'on recherche c'est la richesse et sa mesure par le volume de nos décharges est sans doute mal choisie aujourd'hui.
La voiture est avant tout un service, un service de transport public (il suffit de se retrouver dans des embouteillages pour s'en rendre compte) qui reproduit un espace privé autour du transporté. On pourra opposer à celui-ci le mode de transport en commun, dont la saturation systématique, même lorsqu'il se multiplie, n'est pas le signe d'un dysfonctionnement. Mais restons sur cette industrie automobile, qui, aujourd'hui, qui vise la production et la reproduction sans lien au territoire.
La richesse, c'est le service rendu par la voiture, le transport, lui-même limité par des limites sans doute cognitives (Le pic de déplacement), mais guère dé-localisable. La seule idée qui semblerait tenable serait donc de lier une production de moyens de transports, peut-être sous la forme d'automobile, suffisamment fiables pour être associés à un service local performant, du type velib'.
Un tel service ne peut pas répondre à l'invention marketing du produit différenciant. Narvic avait écrit un bel article sur "l'eau conceptuelle" en concurrence avec le circuit public de distribution d'eau potable comme analogie de la distribution de l'information sur le web, par Google, par rapport à l'industrie de la presse, cet article n'est hélas plus accessible (ou plutôt difficilement). Dans cet article Narvic essayait de démontrer la puissance du service ouvert par rapport au produit-déchet et la richesse produite malgré une perte sèche de mesure directe. Cela reste vrai avec l'automobile, même s'il faut comprendre qu'un tel service demande beaucoup d'innovation non technologique, et la non différenciation devra être rattrapée par d'autres qualités, notamment dans sa capacité à répondre au besoin de flux de consommation constant actuel. Evidemment on peut parler de fétichisme, du culte de la propriété... il semblerait que les choses ne fonctionnent plus vraiment de la même manière aujourd'hui.
Alors que se passe-t-il concrètement ? N'avons-nous que des résistances au changement, les industriels de l'automobile sont-ils à la ramasse ? Comme pour l'industrie du disque, mais ici sans concurrence possible d'une économie immatérielle, l'industrie de l'automobile a du mal à se révolutionner, en gardant des tarifs ou des conditions totalement surréalistes. Les offres de leasing sont chères, réservées aux modèles neufs, sans prestation intéressante, sans suivi d'ailleurs, sans socialisation d'aucune sorte... en fait toujours rien qui permette une localisation de l'économie si ce n'est la gestion de paperasserie propre au transfert de propriété et au marketing.

Il n'y aura pas de retour aux années 60.

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